⁢d. La nation

Le jeu des dialectiques familiales ne s’arrête pas là. La paternité et la maternité de la Patrie ont élargi la fraternité familiale à l’échelle d’un peuple et vont le transformer en nation.

Comment ?

La paternité a poussé l’homme-maître à « dépasser sa domination en faveur de la famille ». De même, la paternité de la Patrie va exercer son autorité au bénéfice du peuple : le maître devient seigneur, puis prince, puis État. La dialectique conjugale qui interfère avec la dialectique du maître-esclave oriente « le travail servile et l’activité du maître vers une collaboration commune, au service de la liberté de tous et de chacun. » La maternité de la Patrie va jouer le même rôle que la femme au sein de la famille et va susciter « l’exigence d’une « chose commune », d’une « république » « . La tension paternité-maternité se transforme « en polarité de l’État et de la Société ». La fraternité du peuple « scelle l’interaction du politique et de l’économique réalisée sous l’influence de la paternité et de la maternité de la Patrie, et en retour s’en trouve par elles profondément transformée. » La fraternité qui implique « reconnaissance égale et réciproque […] informe progressivement le monde des habitudes et des coutumes jusqu’à permettre l’édification d’un ordre de droit, inspiré par un idéal de justice ». C’est par cette reconnaissance égale et réciproque que le peuple devient Nation.⁠[1]

Entre les nations maintenant, il y a soit une dissociation des deux dialectiques et c’est la guerre soit une « recomposition par la médiation d’une unité supérieure »[2]


1. Id., pp. 317-320. Notons encore qu’en période de paix, la dialectique maître-esclave s’estompe au profit de la dialectique homme-femme tandis qu’en période révolutionnaire, lutte à mort et lutte amoureuse se disputent : on veut, par exemple, un chef de son choix, des élections pour bannir la violence. (Id., p. 319). Le P. Fessard écrit : « La révolution est le moment de négation qui, dans l’existence de la communauté humaine comme en celle de tout être, est la condition du progrès. » (Id., p. 349).
2. Id., p. 321.