⁢b. Les progrès de l’œcuménisme et du dialogue interreligieux.

On se souvient, d’une part, que le texte qui a été à l’origine de la déclaration Dignitatis humamae a été préparé par le Secrétariat pour l’Unité des chrétiens ; on sait d’autre part que les textes conciliaires forment un tout cohérent et qu’un texte doit être lu à la lumière de l’ensemble. On ne comprendre sérieusement Dignitatis humanae en faisant fi de Lumen gentium ou de Gaudium et spes, en ignorant Gravissimum educationis momentum dont la problématique est déjà présente dans la question de la liberté religieuse ou le décret Ad gentes sur l’activité missionnaire. On ne peut non plus lire Dignitatis humanae sans tenir compte de ses affinités étroites avec le décret sur l’œcuménisme Unitatis redintegratio dont il devait être le cinquième chapitre et avec la déclaration Nostra aetate sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes. Or, il est clair que, dans ces textes, l’Église cherche sincèrement le dialogue dans un esprit positif et compréhensif.

Il est important de noter que, parlant des non chrétiens, l’Église déclare nettement que « nous ne pouvons invoquer Dieu, Père de tous les hommes, si nous refusons de nous conduire fraternellement envers certains des hommes créés à l’image de Dieu. La relation de l’homme à Dieu le Père et la relation de l’homme à ses frères humains sont tellement liées que l’Écriture dit : « Qui n’aime pas ne connaît pas Dieu » (1 Jn 4, 8).

Par là est sapé le fondement de toute théorie ou de toute pratique qui introduit entre homme et homme, entre peuple et peuple, une discrimination en ce qui concerne la dignité humaine et les droits qui en découlent.

L’Église réprouve donc, en tant que contraire à l’esprit du Christ, toute discrimination ou vexation opérée envers des hommes en raison de leur race, de leur couleur, de leur classe ou de leur religion ».⁠[1]

L’esprit n’est donc plus à l’anathème. Comme l’écrivait, juste avant le Concile, A. Dondeyne : « Au lieu de ne voir dans les religions non-chrétiennes qu’idolâtrie, dépravation morale, accumulation de sottises, nous y découvrons maintenant une secrète recherche de Dieu. Nous mettons l’accent beaucoup plus sur ce qui nous rapproche que sur ce qui nous sépare et sommes convaincus que toutes les grandes cultures ont quelque chose à nous apprendre, sans méconnaître que nous avons beaucoup à leur donner. On pourrait, continue-t-il, en dire autant en ce qui concerne nos rapports avec les chrétiens séparés de Rome, protestants et orthodoxes. Là où il n’y eut d’abord que cohabitation forcée, jaillit maintenant un dialogue sincère et fécond ».⁠[2]

Il n’était pas possible, dans cet esprit, de continuer à penser en termes de tolérance.Sur ce sujet et sans aucune préoccupation religieuse, le philosophe André Comte-Sponville⁠[3] fait quelques remarques fort intéressantes qui rejoignent, à son corps défendant, la nouvelle position de l’Église en la matière. Pour lui, si la recherche de la vérité doit se faire dans la liberté, la tolérance est sans objet dès que la vérité est connue avec certitude. Le problème de la tolérance ne se pose que dans les questions d’opinion. La tolérance se présente alors, comme l’écrivait sagement Alain, comme « un genre de sagesse qui surmonte le fanatisme, ce redoutable amour de la vérité ». Mais peut-on tout tolérer en le domaine des « croyances incertaines » ? Pour l’auteur, la tolérance universelle est tout d’abord condamnable parce que, si tolérer signifie accepter ce qu’on pourrait condamner et donc « prendre sur soi », on ne peut se permettre de tolérer la souffrance des autres. d’autre part, la tolérance universelle est contradictoire. En effet, elle se nierait elle-même puisqu’elle laisserait la liberté à ceux qui veulent détruire la tolérance. La tolérance ne peut donc qu’être limitée. Ne vaudrait-il pas mieux, en définitive, utiliser un autre mot ? Il y a de la condescendance dans le fait de tolérer. Tolérer les opinions d’autrui, c’est les considérer comme inférieures et si on les tolère c’est peut-être parce qu’on ne peut les interdire. Or, si la liberté de croire est de droit, elle n’a pas à être tolérée mais respectée et protégée. Il faudrait parler de respect plutôt que de tolérance. Si ce mot s’est imposé, « c’est sans doute que d’amour ou de respect chacun se sent trop peu capable s’agissant de ses adversaires…​ ». La tolérance est certainement une attitude nécessaire, au départ, pour éviter la barbarie, mais, c’est une « petite vertu » qui doit être dépassée. Comme le confirme V. Jankélévitch, « En attendant le beau jour où la tolérance deviendra aimante, nous dirons que la tolérance est ce qu’on peut faire de mieux ! La tolérance -si peu exaltant que soit ce mot- est donc une solution passable ; en attendant mieux, c’est-à-dire en attendant que les hommes puissent s’aimer, ou simplement se connaître et se comprendre, estimons-nous heureux qu’ils commencent par se supporter. La tolérance est donc un moment provisoire ».⁠[4]

Comment l’Église qui prétend se construire sur l’amour aurait-elle pu ne pas un jour parier pour ce dépassement de la tolérance ?

Il y a donc un lien étroit entre œcuménisme et liberté religieuse « tout simplement, explique le cardinal Willebrands, parce que le dialogue, de soi, veut la réciprocité, et donc une certaine égalité (…). Là où il n’y a pas cette réciprocité, il n’y a pas de dialogue ». ⁠[5]

Ce n’est pas l’objet de cette étude de définir et justifier théologiquement cette « certaine égalité ». Rappelons simplement ici sur quelle base objective commune le dialogue peut s’engager et de quel statut commun les acteurs du dialogue peuvent se réclamer.

Jean-Paul II écrit : « Le dialogue n’est pas la conséquence d’une stratégie ou d’un intérêt, mais c’est une activité qui a ses motivations, ses exigences et sa dignité propres : il est demandé par le profond respect qu’on doit avoir envers tout ce que l’Esprit, qui « souffle où il veut », a opéré en l’homme. Grâce au dialogue, l’Église entend découvrir les « semences du Verbe »[6], les « rayons de la vérité qui illumine tous les hommes »[7], semences et rayons qui se trouvent dans les personnes et dans les traditions religieuses de l’humanité. Le dialogue est fondé sur l’espérance et la charité, et il portera des fruits dans l’esprit. Les autres religions constituent un défi positif pour l’Église d’aujourd’hui ; en effet, elles l’incitent à découvrir et à reconnaître les signes de la présence du Christ et de l’action de l’Esprit, et aussi à approfondir son identité et à témoigner de l’intégrité de la révélation dont elle est dépositaire pour le bien de tous. On voit par là quel esprit doit animer ce dialogue dans le contexte de la mission. L’interlocuteur doit être cohérent avec ses traditions et ses convictions religieuses et ouvert à celles de l’autre pour les comprendre, sans dissimulation, ni fermeture, mais dans la vérité, l’humilité, la loyauté, en sachant bien que le dialogue peut être une source d’enrichissement pour chacun. Il ne doit y avoir ni capitulation, ni irénisme[8], mais témoignage réciproque en vue d’un progrès des uns et des autres, sur le chemin de la recherche et de l’expérience religieuses et aussi en vue de surmonter les préjugés, l’intolérance et les malentendus. Le dialogue tend à la purification et à la conversion intérieure qui, si elles se font dans la docilité à l’Esprit, seront spirituellement fructueuses ».⁠[9]

Au niveau des personnes, la constitution dogmatique Lumen gentium[10] va plus loin. Dans sa description du peuple de Dieu, non seulement elle se déclare « unie pour de multiples raisons » aux chrétiens non catholiques mais même vis-à-vis de « ceux qui n’ont pas encore reçu l’Évangile », elle n’hésite pas à dire que « sous des formes diverses, eux aussi sont ordonnés au peuple de Dieu ». Lumen gentium salue en premier les Juifs et les Musulmans, tous « enveloppés dans le dessein du salut ». « Et même des autres, continue le texte, qui cherchent encore dans les ombres et sous des images un Dieu qu’ils ignorent, Dieu n’est pas loin, puisque c’est lui qui donne à tous vie, souffle et toutes choses (cf. Ac, 17, 25-28), et puisqu’il veut, comme sauveur, que tous les hommes soient sauvés (cf. 1Tm, 2, 4). En effet ceux qui, sans qu’il y ait de leur faute, ignorent l’Évangile du Christ et son Église, mais cherchent pourtant Dieu d’un cœur sincère et s’efforcent, sous l’influence de sa grâce, d’agir de façon à accomplir sa volonté telle que leur conscience la leur révèle et la leur dicte, ceux-là peuvent arriver au salut éternel. A ceux-là même qui, sans faute de leur part, ne sont pas encore parvenus à une connaissance expresse de Dieu, mais travaillent, non sans la grâce divine, à avoir une vie droite, la divine Providence ne refuse pas les secours nécessaires à leur salut. En effet, tout ce qui, chez eux, peut se trouver de bon et de vrai, l’Église le considère comme une préparation évangélique et comme un don de Celui qui illumine tout homme pour que, finalement, il ait la vie ».

Le texte s’appuie, entre autres, sur saint Thomas écrivant que « les infidèles, bien qu’ils ne soient pas actuellement de l’Église, lui appartiennent cependant en puissance ; et cette puissance repose sur deux fondements : d’abord et principalement sur la vertu du Christ qui suffit au salut de tout le genre humain ; ensuite sur le libre arbitre ».⁠[11]

Une « certaine » égalité existe donc entre les interlocuteurs puisque la vérité a été semée partout plus ou moins généreusement, plus ou moins fructueusement et que tous, de différentes manières, à des titres divers, appartiennent au peuple de Dieu.

En tout cas cette vision entraîne la nécessité d’adapter la pédagogie de la mission. Il s’agit pour le chrétien d’annoncer le Christ, unique sauveur, et son Église tout en respectant le rythme et le « caractère » de la conscience de l’autre. Et cet autre est tenu à la fois de suivre sa conscience et de chercher la vérité Dans les deux cas, c’est la conscience morale, conscience morale droite, telle qu’elle a été décrite par Paul, qui est sollicitée.⁠[12]

Face à l’obligation d’annoncer  »l’unique et vraie religion » et de « chercher la vérité, surtout en ce qui concerne Dieu et son Église », dès le premier chapitre de Dignitatis humanae, « le Concile déclare que ce double devoir concerne la conscience de l’homme et l’oblige, et que la vérité ne s’impose que par la force de la vérité elle-même qui pénètre l’esprit avec autant de douceur que de puissance. Or, puisque la liberté religieuse que revendique l’homme dans l’accomplissement de son devoir de rendre un culte à Dieu concerne son immunité de toute contrainte dans la société civile, elle ne porte aucun préjudice à la doctrine catholique traditionnelle sur le devoir moral de l’homme et des associations à l’égard de la vraie religion et de l’unique Église du Christ.[13]

Tout chrétien est missionnaire, « mais la charité du Christ le presse aussi d’agir avec amour, prudence, patience, envers ceux qui se trouvent dans l’erreur ou dans l’ignorance de la foi. Il faut donc prendre en considération tant les devoirs envers le Christ, Verbe vivifiant, qui doit être annoncé, que les droits de la personne humaine et la mesure de grâce que Dieu, par le Christ, a départie à l’homme, invité à accueillir et à professer la foi de son plein gré ».[14] Cette pédagogie est bien évangélique même si elle a été souvent oubliée. Il n’empêche, par exemple, qu’à l’occasion des conquêtes d’Amérique, au XVIe siècle, un homme comme Las Casas rédigea, entre 1522 et 1527, un ouvrage particulièrement intéressant, au titre évocateur : De unico modo vocationis gentes ad veram religionem.[15] Ce livre remarquable qui peut être considéré comme le premier traité de missiologie que l’on connaisse, dénonce clairement, sauf en cas de légitime défense, toute guerre et a fortiori toute guerre qui se prétendrait « sainte ». « Ce terme, écrit-il, est odieux et satanique. Il vient tout droit du jihad de Mahomet ». S’attardant longuement à l’ »évangélisation » et nourri de saint Thomas, des Pères de l’Église (saint Jean Chrysostome et saint Augustin), du droit canon mais aussi de sages antiques comme Cicéron, il invite le missionnaire à imiter le Christ et à suivre les saints, à procéder lentement, par étapes, dans la paix, avec douceur⁠[16], humilité, désintéressement, patience sans jamais exercer de contrainte car « le Christ n’a pas autorisé ses apôtres ni ses disciples à contraindre ceux qui ne voulaient pas les écouter, ni à punir ceux qui les chassaient de leurs villages ».⁠[17] Il y reviendra encore plus loin affirmant que « toute contrainte est contraire à la divine sagesse » : « Le Christ a demandé qu’en entrant dans une maison, on commence par en saluer les habitants. Il a aussi demandé à ses disciples de soigner les malades et de ressusciter les morts, de chasser les démons (…). La contrainte, au contraire, engendre haines implacables et augmente le domaine du démon. Ceux qui usent de ces méthodes inhumaines n’échapperont pas au châtiment ».⁠[18]

Il fustigera « les religieux qui, punissent les Indiens par le fouet ou la prison « pour tout péché commis avant ou après leur conversion ». Il rappellera cette parole sage du pape Nicolas 1er (858-867) : « Ce qu’une personne n’a pas choisi librement, elle ne peut le désirer ni l’aimer ; elle déprécie ce qu’elle n’aime pas. Rien n’est bon si la volonté ne l’accepte » et Las Casas conclura que « la foi ne peut être reçue, acceptée que librement et dans un climat de tranquillité, de quiétude ». ⁠[19]

En 1537, un des confrères de Las Casas obtint du pape Paul III la bulle Sublimis Deus qui reprenait et confirmait la pensée de l’illustre dominicain. La bulle stipulait clairement que les Indiens « ainsi que tous les autres peuples qui, dans l’avenir, parviendront à la connaissance des chrétiens, bien qu’ils soient encore loin de la foi chrétienne, ne doivent en aucun cas être privés de la liberté ni de la jouissance de leurs biens et que, tout au contraire, ils doivent pouvoir user de cette liberté et de ces biens et en jouir licitement et ne pas être réduits en servitude. Il faudra inviter ces mêmes Indiens et les autres nations à recevoir la foi chrétienne, par la prédication de la Parole de Dieu et par une vie vertueuse ; et qu’elle est nulle et sans valeur toute autre manière d’agir ; et qu’il faut inviter ces mêmes Indiens et toutes les nations du monde à recevoir la foi au Christ par la prédication de la Parole de Dieu et par les exemples d’une vie bonne ».⁠[20]

L’ouvrage de Las Casas, que le Concile aurait pu citer en maints endroits, nous montre une fois de plus que toute contrainte est néfaste dans l’évangélisation. Ce principe doit éclairer le missionnaire mais aussi l’éducateur. Il doit aussi nous faire comprendre que la confessionnalité de l’État risque d’exercer une contrainte non violente mais réelle sur certaines consciences en les immergeant malgré elles dans une ambiance, en les encadrant de structures « marquées » et, comme souvent jadis, en interdisant le droit de manifester une autre religion « en public ».

Par contre, « un régime de liberté religieuse contribue, de façon notable, à favoriser un état de choses dans lequel l’homme peut être sans entrave invité à la foi chrétienne, peut l’embrasser de son plein gré et la confesser avec ferveur par toute sa vie »[21]

« L’Église donc, fidèle à la vérité de l’Évangile, suit la voie qu’ont suivie le Christ et les apôtres lorsqu’elle reconnaît le principe de la liberté religieuse comme conforme à la dignité de l’homme et à la révélation divine, et qu’elle encourage une telle liberté. Cette doctrine, reçue du Christ et des apôtres, elle l’a, au cours des temps, gardée et transmise.(…) Ainsi, le ferment évangélique a-t-il longtemps agi dans l’esprit des hommes et beaucoup contribué à faire reconnaître plus largement, au cours des temps, la dignité de la personne humaine, et à faire mûrir la conviction qu’en matière religieuse cette personne doit, dans la cité, être exempte de toute contrainte humaine ». ⁠[22]

Ceci ne veut pas dire qu’un État confessionnel est nécessairement intolérant. Tout dépend, bien sûr, de la qualité des personnes et, à travers elles, de la nature des lois établies, comme nous le verrons dans le chapitre suivant. Aujourd’hui, en Europe, on constate que le luthéranisme en Norvège, Suède, Islande et Danemark, l’anglicanisme en Angleterre et le catholicisme au Liechtenstein, à Monaco, à Saint-Marin et à Malte ont le statut de religions d’État ce qui n’empêche pas ces pays d’appliquer le principe de la liberté religieuse. De même, un régime de séparation n’empêche pas nécessairement les signes religieux publics : aux États-Unis, le Président prête serment sur la Bible et les constitutions germanique, helvétique et irlandaise invoquent Dieu. Par contre, dans l’État laïciste du Mexique, la religion catholique qui est la religion de la grande majorité du peuple, a subi interdictions et discriminations juridiques pendant près de quatre-vingts ans⁠[23]. Le Mexique pratique, disait Paul VI, un « confessionnalisme en négatif »[24].

Toutefois, un État non confessionnel qui reconnaît pleinement le droit à la liberté religieuse telle qu’elle est définie dans Dignitatis humanae, évite bien des ambigüités et des difficultés car, dans nos sociétés pluralistes, la permanence de signes publics religieux bien définis est susceptible d’exaspérer bien des sensibilités et de provoquer des réactions de rejet qui peuvent aller au delà d’une contestation légitime et porter préjudice à l’évangélisation.


1. Nostra aetate, n° 5.
2. Op. cit., pp. 276-277.
3. Petit traité des grandes vertus, Puf, Perspectives critiques, 1995, pp. 209-228. Sa réflexion est d’autant plus intéressante que, par ailleurs, l’auteur met sur le même pied Staline et Jean-Paul II coupable d’une encyclique intolérante à ses yeux (Veritatis spendor) qu’il rebaptise Veritatis terror.
4. Traité des vertus, II, 2, Flammarion, 1986, p. 92, cité in COMTE-SPONVILLE, Petit traité des grandes vertus, PUF, 1995, pp. 227-228.
5. La liberté religieuse et l’œcuménisme, in La liberté religieuse, Cerf, 1967, p. 240, cité in BARTHE, op. cit., p.104.
6. Cette expression est reprise au décret Ad gentes, n°11 et n°15.
7. Cette expression est empruntée à la déclaration Nostra aetate, n°2.
8. Dans le langage courant, le mot évoque une volonté de pacification en cherchant ce qui rapproche et en minimisant ce qui sépare. Sous la plume de Jean-Paul II, le mot est pris dans le sens où Pie XII l’utilise dans l’encyclique Humani Generis (1950) pour désigner l’attitude de ceux qui tolèrent des erreurs inacceptables par un souci déplacé de paix et de conciliation. (Théo)
9. Lettre encyclique Redemptoris missio (RM), 7-12-1990, n° 56.
10. N° 15 et 16.
11. Somme théologique, IIIa, q 8, a 1.
12. Cf. Rm, 2, 14-16. Pour expliquer la différence entre conscience morale et conscience psychologique, P. Foulquié compare la conscience à un témoin. « Or, écrit-il, le témoin peut prendre deux attitudes différentes.
   Tout naturellement, s’érigeant en juge, il approuve ou condamne ce qu’il observe. La conscience qui approuve ou condamne est la conscience morale qu’on peut définir : le pouvoir de porter des jugements sur la valeur morale des actes humains.
   Mais le témoin peut aussi, faisant abstraction de la valeur morale des actions observées, se contenter, comme l’agent de police, d’une simple constatation. La conscience qui observe et constate les faits psychologiques est la conscience psychologique qu’on peut définir : le pouvoir ou la faculté de percevoir sa propre activité psychique, ou encore l’acte même par lequel on la perçoit » (Psychologie, Les Editions de l’Ecole, 1959, p. 157). Si la conscience morale et la conscience psychologique se complètent et s’influencent , elles ne doivent pas se confondre. L’individualisme et le subjectivisme se nourrissent d’une conscience fermée sur le sujet qui est à elle-même sa propre loi et décide souverainement du bien et du mal. La vraie conscience morale est ouverte à une autre loi, à « l’ordre objectif de la création et de la rédemption » (BRUGUES). Comme l’a rappelé le Concile, « la moralité du comportement ne dépend pas de la seule appréciation des motifs ; mais elle doit être déterminée selon des critères objectifs, tirés de la nature même de la personne et de ses actes... » (GS, n°51). La conscience morale n’est pas infaillible comme le pensait Rousseau, elle doit être éduquée. Selon la belle formule de J.-L. Bruguès, « avant de devenir responsable devant sa conscience, on est responsable de sa conscience ».
13. DH n°1, §3
14. DH, 14 §3
15. Traduit en français par Marianne Mahn-Lot, sous le titre « modernisé » : De l’unique manière d’évangéliser le monde entier, Cerf, 1990.
16. « …​que les prédicateurs se montrent doux, affables, pacifiques, aimables, bienveillants…​ », id., p. 66.
17. Id., p.55.
18. Id., p. 105.
19. Id., pp. 134-136.
20. Cité par LAS CASAS, op. cit., pp. 94-95.
21. DH, n°10.
22. DH, n°12.
23. Après l’indépendance de 1821, le gouvernement mexicain a cherché à combattre l’influence de l’Église. Ses droits juridiques ont été niés puis ses biens ont été confisqués. La Constitution de 1917 est une attaque explicite contre l’Église : l’État ne reconnaît plus aucun droit civil aux prêtres, religieuses et séminaristes. Les chrétiens sont privés de la liberté d’enseignement, de manifestation, de presse et d’expression politique. En 1926 a commencé la « guerre des cristeros »: jeunes ouvriers, étudiants, paysans revendiquent la liberté religieuse par des grèves, un boycottage économique et puis la lutte armée. En 1929, l’Église est obligée d’accepter un modus vivendi pour mettre fin au conflit. En 1991, un pas décisif est franchi : la Constitution mexicaine accorde aux Églises la reconnaissance juridique mais maintient ne nombreuses restrictions.
   Enfin, le 1er décembre 2000, Vincente Fox Quesada était élu président. Ce catholique divorcé a proposé une réforme en 10 points : -Promouvoir le respect du droit à la vie de la conception à la mort naturelle -Encourager l’union familiale -Respecter le droit des parents à éduquer leurs enfants -Promouvoir le libre accès à l’assistance spirituelle et religieuse dans les hôpitaux, prisons et centres d’assistance -Répondre à l’exigence des Églises d’un plus grand espace de liberté religieuse (sur base de l’art. 24) -Abolir les restrictions à la liberté religieuse( reprises dans l’art. 130) -Permettre aux Églises d’utiliser des moyens de communication pour répandre leurs idées et favoriser leurs activités -Promouvoir un régime de déduction fiscale pour les activités des Églises contribuant au développement humain -Autoriser l’introduction et la permanence des ministres du culte -Promouvoir l’homologation des études ecclésiastiques dans le respect des programmes et des matières proposés par les séminaires et instituts de formation religieuse.(cf. fides.org).
24. Allocution au Corps diplomatique, janvier 1978. Sur ces questions, on peut lire : d’ONORIO J.B., Religions et libertés dans les Constitutions d’Europe de l’Ouest, in La liberté religieuse dans le monde, Actes du Colloque international d’Aix-en-Provence, Téqui, 1990 et, du même, La crise de la laïcité française, in La laïcité au défi de la modernité, op. cit., pp. 48-57.