Version imprimable multipages. Cliquer ici pour imprimer.

Retour à la vue standard.

i. La liberté religieuse

Même si nous avons déjà touché à cette question dans le chapitre précédent, il est fondamental d’y revenir en profondeur car la position de l’Église, en cette matière, conditionne la raison et le sens de cette laïcité de l’État que bien des chrétiens n’ont pas encore comprise ni acceptée.

Lors des travaux préparatoires du Concile, il avait été question d’inclure la question « Des relations entre l’Église et l’État » dans le schéma consacré à l’Église, De Ecclesia, qui deviendra la constitution Lumen gentium.

Ce problème sera finalement abordé au § 76 de Gaudium et spes : « La communauté politique et l’Église » et dans Dignitatis humanae qui, lors des mêmes travaux préparatoires, constitua d’abord le chapitre V du schéma sur l’œcuménisme (le futur décret Unitatis redintegratio) avant de devenir une déclaration à part entière.

De plus, on sait que c’est très précisément la déclaration conciliaire sur la liberté religieuse qui a focalisé les oppositions les plus farouches à l’ensemble du Concile accusé de rompre avec la tradition catholique. Raison supplémentaire de nous y attarder.

⁢a. Une conquête civile

La liberté religieuse est d’abord une liberté civile, fruit des révolutions qui ont marqué la fin du XVIIIe siècle. Elle découle logiquement des libertés de conscience, d’opinion, d’expression, de presse et d’association.

Nous en trouvons une première formulation en 1776 aux États-Unis : « Le Congrès ne pourra faire aucune loi concernant l’établissement d’une religion ou interdisant son libre exercice, restreignant la liberté de la parole ou de la presse, ou touchant au droit des citoyens de s’assembler paisiblement et d’adresser des pétitions au Gouvernement pour le redressement de leurs griefs ».⁠[1]

La Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, en France, en 1789 stipule : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi.

La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme ; tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi »[2].

En 1831, les articles 14, 15 et 16 de la Constitution belge déclarent: « La liberté des cultes, celle de leur exercice public, ainsi que la liberté de manifester ses opinions en toute matière sont garanties, sauf la répression des délits commis à l’occasion de ces libertés.

Nul ne peut être contraint de concourir d’une manière quelconque aux actes et aux cérémonies d’un culte, ni d’en observer des jours de repos.

L’État n’a le droit d’intervenir ni dans la nomination ni dans l’installation des ministres d’un culte quelconque, ni de défendre à ceux-ci de correspondre avec leurs supérieurs et de publier leurs actes, sauf, en ce dernier cas, la responsabilité ordinaire en matière de presse et de publication.

Le mariage devra toujours précéder la bénédiction nuptiale, sauf les exceptions à établir par la loi, s’il y a lieu ».

La Déclaration universelle des droits de l’homme, reconnaît, en 1948, que « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction seule ou en commun, tant en public qu’en privé, par l’enseignement, les pratiques, le culte et l’accomplissement des rites.

Tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit.

Toute personne a le droit à la liberté de réunion et d’associations pacifiques.

Nul ne peut être obligé de faire partie d’une association. »[3]

La Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales suit, en 1950, en son article 9, la voie tracée par la Déclaration universelle : « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites.

La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui ».

Comme on le constate, la déclaration américaine comme la déclaration universelle ne mettent pas de limite à l’exercice de cette liberté tandis que les déclarations française, belge et européenne rappellent les exigences de la loi. Reste à savoir évidemment quelles sont les balises qui seront définies par la loi. La notion d’ »ordre public » peut être interprétée de différentes manières. Quand on parle de « délits », on suppose qu’il s’agit de délits de droit commun, ce qui est tout à fait normal à condition que ces délits aient une base objective. Par contre, les restrictions de la Constitution chinoise étranglent la notion de liberté religieuse en la réduisant au plus étroit domaine privé possible.


1. 92 Déclaration d’indépendance des États-Unis, 1er amendement. Nous reviendrons sur le libéralisme intégral de cet article qui pose problème, comme nous le verrons, dans la mesure où il ne met aucune restriction à l’exercice de ce droit.
2. Articles 10 et 11. Dans ce texte, au contraire de la Déclaration américaine, la liberté est mesurée par la Loi qui est « l’expression de la volonté générale » (art. 6). Sans autre précision, le droit à la liberté religieuse n’est donc pas un droit objectif et imprescriptible. Nous avons vu, dans la première partie, les problèmes soulevés par la Constitution civile du clergé en 1790. Plus fragile encore est cette même liberté religieuse telle qu’elle est reconnue à l’article 36 de la Constituion de la République populaire de Chine, en 1982: « Les citoyens de la République populaire de Chine jouissent de la liberté religieuse.
   Aucun organisme d’État, aucun groupement social, aucun individu ne peut contraindre un citoyen à épouser une religion ou à ne pas la pratiquer, ni adopter une attitude discriminatoire à l’égard du citoyen croyant ou du citoyen incroyant.
   L’État protège les pratiques religieuses normales. Nul ne peut se servir de la religion pour troubler l’ordre social, nuire à la santé des citoyens et entraver l’application du système d’enseignement de l’État.
   Les groupements religieux et les affaires religieuses ne sont assujetties à aucune domination étrangère ».
   C’est ainsi, que très légalement, le gouvernement chinois a imposé une Église officielle aux catholiques accusés d’être des agents de l’Occident puisqu’ils dépendent d’une « puissance étrangère ». Les catholiques fidèles à Rome et regroupés dans une Église clandestine sont persécutés car soupçonnés de vouloir saper les fondements de l’idéologie officielle (Cf. MATHOUX Louis, La grande peur des chrétiens chinois, in Dimanche n° 42, 11-11-2001). En 1996, la Conférence épiscopale clandestine de Chine a publié une Lettre pastorale à l’occasion du 70e anniversaire de l’ordination des premiers évêques chinois et du 50e anniversaire de l’établissement de la hiérarchie dans l’Église de Chine. S’appuyant sur les velléités démocratiques des dirigeants, sur certaines déclarations parues dans la presse du Parti et même sur Lénine à propos de la séparartion entre la religion et la politique, les évêques chinois, face à une une recrudescence de persécutions, écrivent : « A l’heure actuelle, nous souhaitons que les dirigeants gouvernementaux soient fidèles à leurs propres principes et respectent la liberté religieuse. La doctrine catholique a toujours enseigné l’amour de la patrie, l’obéissance à ses lois et le respect de ses dirigeants à tous les niveaux. Elle enseigne aussi qu’un bon chrétien est un bon citoyen qui aime Dieu et son prochain. Nous demandons au gouvernement de relâcher les évêques, les prêtres et les chrétiens emprisonnés, de garantir que les cérémonies religieuses dans les maisons privées ne soient pas perturbées, d’appliquer consciencieusement la démocrtaie et l’État de droit, et de protéger le droit du peuple à la croyance religieuse. » (In DC n° 2156, 16 mars 1997, p. 269). Notons qu’en février 2002, l’Agence Fides publiait « une liste de 33 noms de prêtres et évêques enlevés par la police - sans aucune accusation, et qui ont disparu depuis lors- ou empêchés d’exercer leur ministère pastoral, en raison du contrôle de la police, ou de leur mise en résidence surveillée » (Zenit.org, 15-2-2002). En 2018, un accord provisoire a été signé sur la nomination des évêques catholiques en Chine afin qu’ils soient en communion avec Rome. Même s’il ne règle pas tous les problèmes, cet accord est un premier pas dans le dialogue.
3. Articles 18-20.

⁢b. La position de l’Église

C’est lors du Concile Vatican II que l’Église catholique prendra position de manière claire et très officielle à travers la déclaration « Dignitatis humanae ».

Il y a, on le sait, dans les documents du Concile, trois genres différents : les constitutions, les décrets et les déclarations.

La constitution est un développement dogmatique (Lumen gentium, sur l’Église ; Dei verbum, sur la Révélation) ou présente un développement dogmatique qui fonde des dispositions pratiques (Sacrosanctum concilium, sur la sainte liturgie) ou des instructions pastorales (Gaudium et spes, sur l’Église dans le monde de ce temps).

Le décret a une finalité pratique dont les enracinements sont à rechercher dans Lumen gentium[1].Enfin, dans une déclaration⁠[2], les dispositions pratiques préconisées ne s’adressent pas seulement aux membres de l’Église et ne se déduisent pas immédiatement de la Révélation. Ainsi, Dignitatis humanae recommande l’application de certains principes à toutes les collectivités civiles existantes et à venir. Celles-ci, bien sûr, relèvent de différentes traditions culturelles qui sont elles-mêmes imprégnées plus ou moins de diverses traditions religieuses ou anti-religieuses. Par ailleurs, Dignitatis humanae fonde, dans sa première partie, le principe de la liberté religieuse sur une philosophie de la personne accessible théoriquement à toute intelligence. Mais cette philosophie est implicitement chrétienne et la seconde partie montre que cette conception a ses racines dans la Révélation ce qui garantit son enracinement dogmatique⁠[3].

Le sous-titre de cette déclaration limite d’ailleurs la portée du texte à la société politique en parlant « Du droit de la personne et des communautés à la liberté sociale et civile en matière religieuse ».⁠[4]


1. Il y a 9 décrets : Christus Dominus, sur la charge pastorale des évêques dans l’Église ; Presbyterorum ordinis, sur le ministère et la vie des prêtres ; Optatam totius Ecclesiae renovationem, sur la formation des prêtres ; Perfectae caritatis, sur la rénovation et l’adaptation de la vie religieuse ; Apostolicam actuositatem, sur l’apostolat des laïcs ; Ad Gentes divinitus, sur l’activité missionniare de l’Église ; Unitatis redintegratio, sur l’œcuménisme ; Orientalium Ecclesiarum, sur les Églises orientales catholiques ; Inter mirifica, sur les moyens de communication sociale.
2. A côté de Dignitatis humanae, on trouve encore deux déclarations : Nostra aetate, sur les relations de l’Église avec les religions non chrétiennes et Gravissimum educationis momentum, sur l’éducation chrétienne.
3. Il est important de lire chaque document conciliaire dans le contexte de l’ensemble des textes. La lecture sérieuse de Dignitatis humanae suppose, au moins, celle de Lumen gentium, Gaudium et spes et Gravissimum educationis momentum.
4. On sait le rôle important joué par le P. John Courtney-Murray sj dans l’élaboration de ce document.

⁢c. Définition du droit à la liberté religieuse.

« Le Concile du Vatican déclare que la personne humaine a droit à la liberté religieuse. Cette liberté consiste en ce que tous les hommes doivent être soustraits à toute contrainte de la part tant des individus que des groupes sociaux et de quelque pouvoir humain que ce soit, de telle sorte qu’en matière religieuse nul ne soit forcé d’agir contre sa conscience ni empêché d’agir, dans de justes limites, selon sa conscience, en privé comme en public, seul ou associé à d’autres ».⁠[1]

Cette formulation rappelle assez clairement les textes des déclarations universelle et européenne qui insistaient aussi sur l’immunité de toute contrainte dans le choix et la manifestation privée ou publique d’une religion. Ce droit implique aussi la possibilité de « changer de conviction ou de religion » ainsi que « de refuser personnellement toute adhésion religieuse ». Le droit à la liberté religieuse est aussi un droit à l’incroyance.⁠[2]


1. DH, n° 2.
2. COSTE René, Les communautés politiques, Desclée, 1967, p. 175.

⁢d. Fondements du droit

Toutefois, la justification du droit est ici plus développée et approfondie que dans les textes profanes.

Sur le plan rationnel, tout d’abord⁠[1], puisque le texte ne s’adresse pas uniquement à des chrétiens, le droit n’est pas présenté comme le simple produit de la volonté humaine, le fruit d’une « disposition subjective ». Au contraire, il trouve son fondement dans la dignité même de l’homme créé à l’image et à la ressemblance de Dieu. Autrement dit, il découle de sa nature d’être doué d’une volonté libre et de raison. Le propre de l’intelligence humaine est de chercher la vérité et d’y adhérer. Mais cette démarche doit se faire sans contrainte pour être bien conforme à la nature même de l’homme. De plus, l’homme étant un être social poursuit la vérité à travers l’enseignement, l’éducation, l’échange, le dialogue, jouit des fruits de sa découverte individuellement et socialement et les manifeste publiquement.

Dignitatis humanae examine ensuite⁠[2] le droit à la liberté religieuse à la lumière de la Révélation. Certes, la notion de liberté religieuse ne se trouve pas directement, explicitement dans les Écritures⁠[3] mais, en revanche, elles nous montrent l’estime que Dieu a pour l’homme. Le respect de Dieu pour la liberté humaine s’exprime dans le dogme selon lequel l’acte de foi est un acte libre. Comme l’écrit le cardinal König, « le principe constitutionnel de la liberté religieuse n’est donc pas une conclusion du dogme chrétien de la liberté de la foi ; mais il est en pleine consonance avec ce que le dogme exige en fin de compte ».⁠[4] La réponse de foi donnée à Dieu par l’homme qui reçoit sa Parole, doit être volontaire et non contrainte.

Le principe de la liberté religieuse est donc conforme à la Révélation, à la manière d’agir du Christ et des Apôtres, à la manière d’agir de l’Église lorsqu’elle fut fidèle à la pédagogie de l’Évangile.


1. Articles 2 à 8.
2. Articles 9 à 12.
3. Si la religion d’Israël est hospitalière pour l’étranger, elle est intolérante pour ses dieux. Les idoles doivent être détruites de même que leurs sectateurs. Toutefois, la force est utilisée pour défendre la vérité, non pour l’imposer. Les princes maccabéens, imposant aux étrangers la circoncision, iront au delà de cette loi. Enfin, la distinction opérée par Jésus entre spirituel et temporel mettra très longtemps à convaincre les esprits que le « prince » n’a pas à imposer sa religion à la « tribu ». Ce qu’auront tendance à faire bien des princes chrétiens, catholiques ou protestants.
4. In Documents conciliaires 3, Centurion, 1966, p. 346.

⁢e. Le rôle des pouvoirs publics

Le droit à la liberté religieuse découlant de la nature même de l’homme transcende le pouvoir civil dont le rôle est de protéger ce droit et d’assurer, pour tous les hommes, des conditions favorables au développement de leur vie religieuse.

Ce droit n’est pas illimité contrairement à ce que semble dire la Déclaration américaine. Il est balisé et limité.

Ce droit est, en effet, comme tous les droits, l’envers d’un devoir qui est de chercher la vérité et d’y adhérer une fois découverte. Telle est, avons-nous vu, la vocation de l’intelligence et de la volonté qui, dans leur conjugaison, assurent la vraie liberté.

d’autre part, l’exercice du droit ne peut porter atteinte à l’« ordre public juste », au bien commun, au droit d’autrui. Le pouvoir civil protégera donc ce droit non en fonction de ses propres règles mais en tenant compte de l’ordre moral objectif. Ce droit fondamental, comme les autres, transcende certes le pouvoir civil mais, par sa nature sociale, il lui est soumis dans les justes limites évoquées.

En tout cas, l’État est déclaré incompétent en cette matière religieuse qui le dépasse. Il n’a pas à militer a priori pour ou contre tel engagement religieux. Mais il n’est pas neutre pour autant dans la mesure où il est le gardien et le promoteur du bien commun qui englobe aussi la dimension religieuse de l’existence. L’histoire montre que l’abstention totale de l’État est une source de conflits, d’abus et de désordre.

Pour illustrer ce point on peut évoquer la différence importante qui existe entre l’attitude des États-Unis et celle des pays européens en matière religieuse. En 1999, par exemple, le département d’État américain a publié un rapport sur la liberté de culte extrêmement critique pour nombre de pays européen et en particulier l’Allemagne. En cause, l’attitude de ces pays vis-à-vis de l’Église de scientologie jugée dangereuse et sectaire de ce côté de l’Atlantique. Ce rapport n’hésitait pas à établir un parallèle entre la sévérité allemande et la « chasse aux sorcières » ou encore la « discrimination antisémite ». Si très justement, le rapport dénonçait des exactions contre des minorités religieuses en Russie et dans l’ex-Yougoslavie, il relevait aussi que « l’armée et la justice turques, avec l’appui de l’élite du pays, continuent de mener campagne contre le fondamentalisme islamique, perçu comme une menace contre la République ». Nous étions, bien sûr, en 1999…​⁠[1].

Comme le confirme Guy Coq, « la liberté religieuse est certes fondamentale, mais toute forme de religion n’est pas compatible avec la démocratie ». C’est le cas de la secte, au sens strict et négatif du mot, c’est-à-dire de tout « groupe qui se constitue comme une véritable contre-société à l’intérieur de la société. Elle donne à un seul, son chef,, son gourou, la totalité des pouvoirs : politique, économique, spirituel, sexuel, sur la totalité des membres de la secte. C’est la confusion de tous ces pouvoirs, leur groupement sur une seule personne, leur accaparement considéré comme légitime dans les limites de la secte, qui constitue le passage à une logique sectaire totalitaire ». Dans ce sens, la secte « est un danger pour la démocratie, puisqu’elle casse l’unité de la société et retire ses membres du pacte social global »[2].


1. Cf. Washington a sa vision des « religions », in La Libre Belgique, 11-12 septembre 1999, p. 15. Il n’empêche que les Quakers ont eu, à certaines époques, quelques difficultés avec les autorités américaines à cause de leur objection de conscience et que les Mormons ont dû en 1887 renoncer à la polygamie.
2. COQ Guy, op. cit., p. 90-91

⁢f. La liberté de l’Église

Dans son analyse, le cardinal König souligne aussi la consonance entre l’institution de la liberté religieuse et la liberté de l’Église⁠[1].

L’Église réclame la liberté d’action pour prêcher l’Évangile à toute créature..Cette mission lui a été assignée par un mandat divin⁠[2] mais on peut aussi, sur un plan purement rationnel, considérer l’Église comme une association d’hommes ayant le droit de vivre dans la société civile selon les préceptes de la foi chrétienne.

Cette consonance entre la liberté religieuse et la liberté de l’Église apparaît dans les faits. Là où la liberté religieuse est respectée, l’Église vit librement. Là où elle connaît des entraves, la liberté de l’Église est menacée, réduite ou jugulée.

Au nom de sa mission qui est d’annoncer la vérité qui est le Christ et au nom de la liberté de l’acte de foi, l’Église a le devoir et donc doit avoir le droit de proclamer , « urbi et orbi »[3] la Bonne Nouvelle comme de « déclarer et de confirmer (…) les principes de l’ordre moral découlant de la nature même de l’homme » mais « avec amour, prudence, patience, envers ceux qui se trouvent dans l’erreur ou dans l’ignorance de la foi ». Cette délicatesse tient aux « droits de la personne humaine et (…​) la mesure de grâce que Dieu, par le Christ, a départie à l’homme, invité à accueillir et à professer la foi de son plein gré ».⁠[4]

Ce dernier aspect sera développé dans le tome V consacré à l’action « politique » des chrétiens.


1. Documents conciliaires, op. cit., p. 348.
2. « Enseignez toutes les nations » (Mt, 28, 19).
3. Littéralement: « à la ville (Rome) et au monde ».
4. DH, n° 14.